Artériopathie oblitérante des membres inférieurs

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L'Artériopathie Oblitérante des Membres Inférieurs (AOMI)[1][2][3] est à l'origine d'un certain nombre d'ulcères de jambe et de plaies du pied et peut ralentir le processus de cicatrisation de toutes les plaies des membres inferieurs

Artériopathie Oblitérante des Membres Inférieurs

Généralités

Définition

  • L'AOMI est définie par l'HAS (Haute Autorité de Santé) comme un rétrécissement du calibre des artères à destination des membres inférieurs qui entraîne une perte de charge hémodynamique, avec ou sans traduction clinique[4]
  • Ces anomalies provoquent une inadéquation entre les besoins en oxygène et les apports, provoquant une hypoxie et une ischémie tissulaire
  • Pathologie fréquente
- plus de 200 millions de personnes atteintes dans le monde
- la prévalence augmente de façon exponentielle au delà de 50 ans et on note une augmentation de la prévalence de 25 % entre 2000 et 2010

Étiologie

Athérosclérose
  • L'origine athéromateuse est l'étiologie la plus fréquente
  • L'AOMI est la composante locale de la maladie athéromateuse dont le pronostic reste conditionné par les complications cardiaques et cérébro-vasculaires
Artériopathie du sujet jeune
  • La découverte d'une AOMI chez un patient jeune nécessite une évaluation étiologique spécifique à la recherche de :
Formes les plus fréquentes Autres causes
Artériopathie juvénile athéromateuse Pathologies emboligènes
Maladie de Buerger Syndrome compressif (artère poplitée piégée)
Anévrisme poplité
Artérite inflammatoire
Causes thrombotiques : syndrome myélo-prolifératif, syndrome des anti-phospholipides
Causes iatrogènes : artérite radique, ergotisme
Anomalies génétiques du tissu élastique

Facteurs de risque

Facteurs non modifiables

  • Sexe → 1 à 2 hommes pour une femme, mais cette différence semble se lisser chez les patients âgés
  • Âge → la prévalence de l'AOMI est variable en fonction de l'âge des patients
- Âge < 50 → < 5 %
- 50 < Âge < 65 → 10 %
- Âge > 80 → 25 %

Facteurs modifiables (pour en savoir plus...)

  • Tabagisme
  • Dyslipidémie
  • Diabète
  • Hypertension artérielle
  • Obésité

Morbidité & Mortalité

  • La prévalence d'un antécédent médical d'infarctus du myocarde est 2.5 fois plus élevé chez les patients avec une AOMI que chez les patients sans AOMI
  • Il existe une augmentation du risque des pathologies ischémique myocardique et ischémique cérébrale chez les patients porteurs d'une AOMI
  • L'AOMI est un marqueur de risque cardiovasculaire. Les patients porteurs d'une AOMI ont un risque relatif estimé de 4 à 5 en comparaison aux sujets sains

Présentations cliniques

Classification en 3 stades

Classification clinique de l'AOMI
  • Plusieurs classifications ont été proposées et notamment celle de Leriche et Fontaine qui reste encore volontiers utilisée en France
  • Nous évoquerons dans cette page la classification du CEMV (Collège des Enseignants de Médecine Vasculaire) en 3 stades
Asymptomatique Ischémie d'effort Ischémie de repos

Stade I : stade asymptomatique

  • Le patient présente une AOMI sans manifestation clinique
  • Dans le cadre de la prise en charge d'un ulcère de jambe, cela correspond au patient porteur d'un ulcère et chez qui l'évaluation découvre une AOMI
  • Il ne s'agit pas, à proprement parler, d'un ulcère artériel mais d'un ulcère avec une artériopathie
  • Le challenge sera d'évaluer, avec les médecins et les chirurgiens vasculaires, la part de l'artériopathie dans le retard de cicatrisation de l'ulcère et s'il faut proposer un traitement spécifique (traitement médical et/ou chirurgical)
  • La morbidité des patients asymptomatiques est identique à celle des patients symptomatiques, ce qui justifie une évaluation complète

Stade II : stade d'ischémie d'effort

Claudication intermittente (CI)
  • Elle correspond à une fatigue, un inconfort ou une douleur qui apparaît dans un groupe musculaire lors d'un exercice ou d'un effort
  • Cette douleur, qui apparaît en aval de l'obstacle, va obliger le patient à limiter son effort. Il est important de noter l'importance de l'exercice : c'est la notion de périmètre de marche (distance de marche à partir de laquelle la douleur apparaît). Le périmètre de marche permet de préciser le niveau du stade
  • La douleur à l'effort disparaît à l'arrêt de l'effort et de l'exercice
Ulcère de jambe et claudication intermittente
  • Là encore, il faut différencier ulcère artériel et ulcère + artériopathie
  • C'est la confrontation clinique et les explorations qui détermineront si l'artériopathie est directement responsable de l'ulcère où si elle n'est qu'un facteur de retard de cicatrisation

Stade III : stade d'ischémie de repos

  • On parle également d'ischémie critique avec des critères cliniques qui doivent être associés à des critères hémodynamiques
  • L'ischémie critique, stade le plus grave de l'artériopathie des membres inférieurs, correspond aux stades III et IV de la classification de Leriche & Fontaine
Critères cliniques Critères hémodynamiques
Des douleurs permanentes ou non du membre inférieur depuis au moins 15 jours Pression de cheville ≤ 50-70 mm Hg
OU un trouble trophique évoluant depuis au moins 15 jours
Pression d'orteil ≤30-50 mm Hg
Pression transcutanée d'oxygène ≤30 mm Hg (TcPO2)

Aspects particuliers

Niveau d'atteinte anatomique variable selon les facteurs de risque
Artériopathie du sujet âgé
Artériopathie du diabétique

En pratique, chez qui chercher une artériopathie ?

Chez tout patient asymptomatique

  • A partir de 50 ans avec au moins 1 facteur de risque
  • Au delà de 70 ans systématiquement, même sans facteur de risque

Chez tous les patients présentant une douleur d'effort

Chez les patients présentant une plaie chronique du membre inférieur (ulcère de jambe ou plaie du pied) ou des douleurs de repos

Chez les patients qui ont besoin de porter un système de compression

Comment chercher une artériopathie chez un patient présentant un trouble trophique des membres inférieurs ?

Examen clinique

Douleur ?
Signes dermatologiques d'ischémie ?
Palpation des pouls

Évaluation fonctionnelle hémodynamique

Mesure de la pression à la cheville et IPS (Indice de Pression de Cheville)
Mesure de la pression au gros orteil (PGO)
  • C'est un test évalué au repos, patient allongé, à l'aide d'un laser ou d'une sonde doppler ou d'un capteur photopléthysmographique
- l'indice de pression PGO (IPGO) est obtenu en divisant la pression à l'orteil par la pression la plus élevée aux 2 bras
  • Intérêt diagnostique
- une PGO inférieure à 70 mmHg est pathologique et témoigne d'une AOMI
- cette mesure est utile dans les situations où il peut exister une rigidité de la paroi artérielle rendant difficile l'analyse de la pression de cheville : diabète, insuffisance rénale, âge > 80 ans
  • Intérêt pronostique
- l'ischémie critique est retenue si PGO < 30 mm Hg
  • Intérêt thérapeutique
- on considère qu'au dessus de 50 mm Hg, les compressions sont autorisées dans le cadre du traitement d'un œdème ou d'un ulcère de jambe
Analyse des flux artériels → écho-Doppler artériel
  • Cette analyse se fait avec une sonde Doppler et les flux sont analysés en fonction de leur aspect
  • Une artère normale donne des flux triphasiques
  • En cas d'anomalie sur une artère, et selon le degré d'atteinte, les flux deviennent biphasiques ou monophasiques
  • La perte du caractère triphasique témoigne d'une atteinte artérielle et justifie un avis spécialisé

Évaluation anatomique

  • Echo-Doppler artériel → cet examen facilement accessible va évaluer la présence de sténose et/ou d'anévrisme
- le Doppler va orienter la décision chirurgicale
- une exploration hémodynamique avec mesure des flux pourra être réalisée au décours du Doppler

Évaluation du retentissement tissulaire

Traitement

Objectifs

  • Contrôle de l'évolution locale de l'AOMI
  • Améliorer le score de la cicatrisation
  • Améliorer la qualité de vie en réduisant les douleurs
  • Réduire le risque général et cardiovasculaire plus spécifiquement

Prise en charge des facteurs de risque

  • Arrêt du tabagisme
  • Équilibre strict du diabète avec une hémoglobine glycosylée (HbA1c) < 7 % chez les patients diabétiques
  • Équilibre nutritionnel pour limiter les risques d'obésité, de diabète et d'hyper cholestérolémie
  • Activité physique régulière pour contrôler plusieurs facteurs de risque cardiovasculaire → Tension artérielle / taux de cholestérol LDL (LDL-C) et HDL / poids corporel / sensibilité à l’insuline

Traitement pharmacologique[6]

Traitement anti-thrombotique
  • Les traitements anti-thrombotiques ont pour objectif de réduire le risque d'accident thrombotique cérébral, cardiaque et périphérique
  • L'indication de ces traitements va dépendre de la présence de symptômes liés à l’AOMI, incluant la claudication intermittente typique ou atypique, la douleur ischémique de repos, les ulcères ischémiques ou les antécédents de revascularisation des membres inférieurs
- patient asymptomatique → pas de traitement
- patient symptomatique → traitement en monothérapie (Aspirine ou Clopidogrel)
Statines
  • De nombreuses études sur les statines démontrent une relation entre la diminution des niveaux de LDL-C et la réduction relative des taux de maladies cardiovasculaires 
Traitement anti-hypertenseur
  • Le contrôle de la tension artérielle (TA) est indispensable
  • Les données médicales récentes recommandent une réduction de la TA à < 140/90 mmHg chez tous les sujets, y compris ceux avec AOMI. Chez les personnes âgées (> 65 ans), la TA systolique (TAS) idéale cible se situe entre 130 et 140 mmHg (mais pas < 120 mmHg), alors que la TA diastolique (TAD) doit être idéalement < 80 mmHg
  • Chez les patients avec AOMI, il faut veiller à éviter une baisse de la TAS en dessous de 110-120 mmHg → le risque cardiovasculaire augmente si la TAS est trop basse
  • L'utilisation des inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) est recommandée
Traitement de la douleur
Traitement vasodilatateur
  • Au stade d'ischémie d'effort, ces traitements ne semblent pas avoir d'impact
  • Les prostanoïdes (Iloprost / Ilomédine®) ont montré des effets bénéfiques des prostanoïdes pour le soulagement de la douleur au repos et la guérison des ulcères par rapport au placebo. Cependant, une évaluation récente de la Cochrane Library n'a pas permis de montrer d'effet sur l'incidence des amputations totales par rapport au placebo[7].]

Traitement chirurgical

Rééducation vasculaire

Références

  1. https://www.zora.uzh.ch/id/eprint/151454/1/ehx095.pdf
  2. Mahé G, Jaquinandi V. Diagnosis of lower limb peripheral artery disease. Presse Med. 2018 Jan;47(1):47-55.
  3. https://www.ejves.com/article/S1078-5884(19)30380-6/pdf
  4. https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/AOMI_fiche.pdf
  5. Diehm N, Shang A, Silvestro A, DO DD, Dick F, Schmidli J, Mahler F, Baumgartner I. Association of cardiovascular risk factors with pattern of lower limb atherosclerosis in 2659 patients undergoing angioplasty. Eur J Endovasc Surg 2006;31(1):59-63.
  6. https://www.revmed.ch/RMS/2018/RMS-N-630/Traitement-medical-optimal-de-l-arteriopathie-obliterante-des-membres-inferieurs-en-2018
  7. Vietto V, Franco JV, Saenz V, Cytryn D, Chas J, Ciapponi A.Prostanoids for critical limb ischaemia. Cochrane Database Syst Rev.. 2018 Jan 10;1:CD006544.