Pyoderma gangrenosum

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Le Pyoderma gangrenosum est une étiologie spécifique d'ulcère de jambe, lié à une dermatose inflammatoire

Définition

  • Le Pyoderma gangrenosum (PG) est une dermatose neutrophilique[1]
  • Ces dermatoses sont caractérisée par une infiltration cutanée de polynucléaires neutrophiles en l'absence de cause infectieuse
  • Les dermatoses neutrophiliques sont nombreuses (syndrome de Sweet / Pustulose sous-cornée / Erythema elevatum diutinum...) → ces pathologies ont en commun, outre l'aspect histologique déjà évoqué
- une atteinte viscérale possible. Le PG peut donc n'être que la partie émergée de "l'iceberg" et impose une prise en charge beaucoup plus globale
- une association avec d'autres pathologies qu'il faudra rechercher
  • Le Pyoderma gangrenosum doit être évoqué dans un contexte particulier et devant des signes cliniques spécifiques qui seront détaillés
  • Sa reconnaissance implique la nécessité d'un avis spécialisé mais également des règles précises de prise en charge en ce qui concerne les soins locaux

Terrain

  • Un Pÿoderma gangrenosum peut survenir sur un terrain spécifique marqué par des antécédents médicaux et une notion de traumtisme

ATCD

  • Hémopathie maligne ou non : hémopathies myéloïdes / gammapathies monoclonales ...
  • Rhumatisme inflammatoire
  • Maladie Inflammatoire Chronique de l'Intestin (Maladie de Crohn / Rectocolite)
  • Maladie auto-immune
  • Prise de médicaments : facteurs de croissance / minocycline .......

Mode de survenue

  • Le PG peut survenir de façon spontanée
- il s'agit parfois d'un prurit / d'une excoriation superficielle / d'un choc direct minime......
- la différence entre le caractère limité du traumatisme et l'importance de la lésion cutanée doit faire évoquer un PG

Aspect clinique

PG1.png

Au stade pré-ulcéreux il faut reconnaître

Notion d'un traumatisme initial Lésions dermatologiques préalables
Parfois minime Pustules
Parfois induit par les soins de plaie ( détersion / compresse) Bulles de tailles variables, parois à contenu hémorragique
Nodules inflammatoires

Au stade d'ulcère

Localisation

  • Ulcère unique ou multiples
  • Variable : tout peut se voir → un ulcère atypique et de localisation quelconque doit faire évoquer un PG !

Fond de l'ulcère

  • Globalement le PG est une ulcération nécrotique d'extension centrifuge
  • Deux formes cliniques peuvent se rencontrer :
- Forme superficielle : fond nécrotique et bourgeonnant
- Forme végétante avec un aspect hyper bourgeonnant qui est atypique et qui étonne au regard de l'aspect général de la plaie
  • Présence dans le fond des ulcères de fascias, de muscles ou de tendons dans les formes évoluées

Berges

  • Aspect "miné" des berges → présence de pertuis ou de clapiers purulents
  • Bords décollés et nécrotiques

Peau péri-lésionnelle

  • Elle est souvent nflammatoire avec parfois un bourrelet bleu violacé
  • Aspect parfois cribiforme → présence de multiples orifices ponctiformes qui correspondent aux orifices de drainage des micro-abcès

Douleur

  • La douleur est quasiment constante et parfois très intense

Complications & risques de complications

Retard de cicatrisation

  • La cicatrisation d'un PG est difficile et nécessite de stabiliser l'infiltration inflammatoire dermique
  • La prise en charge d'un PG impose la prise en charge des pathologies associées, mais l'évolution de l'ulcère n'est pas forcément parallèle à celle de ces pathologies. En clair, la pathologie associée à un PG meut s'améliorer sans que le PG ne cicatrise !

Aggravation & Extension

  • Un PG peut évoluer en alternant les poussées évolutives et des pseudo-rémissions
  • Les facteurs d’aggravation sont :
- Un traumatisme → ce qui explique que la détersion mécanique est totalement contre-indiquée
- Une poussée évolutive de la pathologie causale

Complications spécifiques

Prise en charge →Avis spécialisé OBLIGATOIRE ++++++++

A qui confier le patient ?

  • Dermatologue / Médecine Interne
  • Équipe multidisciplinaire de cicatrisation avec un dermatologue

Objectif n°1 : confirmer le diagnostic sur la clinique et l'histologie

Diagnostic essentiellement clinique et histologique
  • En l'absence de signe clinique pathohnomonique, différentes grilles de critères ont été établies[2]
  • De nouveaux critères incluent l'analyse histologique → classification selon la présence ou non d'un infiltrat de polynucléaires neutrophiles (PNN)[3][4]
La biopsie ne montre pas d'infiltrat de PNN
Une nouvelle biopsie sera réalisée si l'ulcère s'aggrave ou si de nouveaux signes cliniques apparaissent
Critère majeur obligatoire → La biopsie montre un infiltrat de PNN Nécessité d'au moins 4 critères mineurs pour affirmer le diagnostic
Histologie 1) Exclusion d'une infection
Histoire clinique 2) Traumatisme initial / Pathergie
3) Antécédents de rhumatisme inflammatoire ou de maladies inflammatoire chronique du tube digestif
4) Notion de pustule ou vésicule ou bulle évoluant rapidement vers une ulcération
Clinique 5) Erythème / Bords inflammatoires minés et fragilité des berges
6) Multiples ulcérations ( dont au moins une sur la face antérieure de jambe) qui ne sont pas au même stade d'évolution
7) Cicatrice d'ulcère avec aspect de papier froissé' ou aspect cribiforme
Traitement 8) Réduction de la taille de l'ulcère après 1 mois de traitement par immunosuppresseur

Objectif n°2 → rechercher une pathologie associée

  • Cette recherche est indispensable puisque que plus de 50% des pyoderma sont associés à une pathologie sous jacente qu'il faudra prendre en charge
  • Évaluation clinique et par des examens complémentaire pertinents
Pathologies digestives Rectocolite ulcéreuse / Maladie de Crohn

Hépatite chronique / hépatite C
Polypose intestinale / tumeur carcinoïde

Pathologie rhumatismales Polyarthrite séronégative et polyarthrite rhumatoïde
Hémopathies Leucémies surtout myéloïdes aiguës et chroniques

Syndromes myélodysplasiques et myéloprolifératifs
Gammapathies monoclonales surtout IgA avec ou sans myélome
Lymphomes

Pathologies diverses Déficits immunitaires /SIDA

Tumeurs solides
Lupus érythémateux
Maladie de Behçet / maladie de Takayasu

Objectif n°3 → proposer un traitement général

  • Il doit être discuté systématiquement en milieu hospitalier → cla prise en charge fait essentiellement appel aux immunosuppresseurs avec des approches actuelles associant plusieurs traitements
  • Nous ne ferons ici qu'évoquer les pistes thérapeutiques → des références vous permettront d'en apprendre plus[5][6]
Corticothérapie générale Corticothérapie intra-lésionnelle Immunosuppresseurs (Ciclosporine / Azathioprine / Mycofenolate mofétil / Cyclophosphamide) Disulone Cyclines
  • Ces traitements systémiques peuvent interagir avec le processus de cicatrisation et le limiter
- Diabète induit par les corticoïdes
- infection favorisée par les immunosuppresseurs
- inhibition de la prolifération des kératinocytes par certains immunosuppresseurs

Traitement local d'un ulcère par Pyoderma gangrenosum

Deux impératifs

  • Il n'existe aucun consensus concernant le traitement local des PG, mais 2 impératifs doivent guider les soignants
- calmer la douleur et éviter une douleur induite
- éviter tout traumatisme qui pourrait aggraver la lésion par un phénomène de pathergie

Lavage eau et savon sans traumatisme

  • Éviter l'utilisation de gants de toilette ou de compresse

Détersion mécanique contre-indiquée ou avec une extrème prudence

  • Risque d'extension par phénomène de pathergie : curettes / bistouris

Détersion en milieu humide prudente

  • L'excès d'humidité peut provoquer la prolifération d'un biofilm et majorer l'inflammation
  • Il est préférable d'assécher les lésions avec un pansement absorbant → attention toutefois, un pansement trop sec peut, lui aussi provoquer un traumatisme au retrait

Topiques immunosuppresseurs

  • Leur place n'est pas clairement établie. Néanmoins dans les formes initiales ou peu sévères, on peut débuter avec les 2 traitements suivants :
  • Les dermocorticoïdes[7] peuvent être utilisés directement sur la plaie → sur prescription médicale uniquement
  • Le Tacrolimus ( Protopic Pommade 0.1%) peut également être proposé dans les formes modérées[8] → médicament d'exception qui ne peut être prescrit que par un Dermatologue. Il existe un risque de cancérisation avec un traitement au long cours

Choix raisonné d'un pansement

  • Aucun adhésif → limiter tout traumatisme au retrait
Plaies exsudatives Non douloureuses Au choix → Alginate / fibres de CMC / pansement super-absorbant
Douloureuses interposer une interface lipidocolloïde (Urgotul) entre la plaie et les pansements précédents
Plaies non exsudatives Non douloureuses interface siliconée ou lipidocolloïde / hydrocellulaire à absorption moyenne / fibre de CMC
Douloureuses interface siliconée ou lipidocolloïde + pansement secondaire

Compression adaptée autorisée sous réserve d'une prise en charge de la douleur

Vérifier la vaccination anti-tétanique

Références

  1. Vignon-Pennamen MD, Wallach D. Dermatoses neutrophiliques. EMC-Dermatologie 2016;11(2):1-9 [Article 98-540-A-10]
  2. Su, WP, Davis MD, Weenig RH, Powell FC , Perry HO. Pyoderma gangrenosum: clinicopathologic correlation and proposed diagnostic criteria.Int. J. Dermatol 2004;43: 790–800
  3. Maverakis E et al. Diagnostic criteria of ulcerative pyoderma gangrenosum: a Delphi consensus of international experts. JAMA Dermatol 2018;154:461–466
  4. Jockenhofer F, Wollina U, Salva KA, Benson S, Dissemond J. The PARACELSUS score: a novel diagnostic tool for pyoderma gangrenosum. Br J Dermatol 2019 Mar;180(3):615-620
  5. Hobbs MM, Ortega-Loayza AG. Pyoderma gangrenosum: From historical perspectives to emerging investigations. Int Wound J 2020 ;17:1255-1565
  6. Maverakis E et al.Pyoderma gangrenosum. Nat Rev Dis Primers 2020 8;6(1):81
  7. Thomas KS et al. Clinical outcomes and response of patients applying topical therapy for pyoderma gangrenosum: A prospective cohort study. J Am Acad Dermatol. 2016 Nov;75(5):940-949
  8. Cecchi R et al. Successful treatment of localized pyoderma gangrenosum with topical pimecrolimus.J Cutan Med Surg. 2012 Sep-Oct;16(5):295-7.